Une histoire du mouvement révolutionnaire (1881-1914) – avec Guillaume Davranche
Une émission de juillet 2016 d’histoire du mouvement révolutionnaire, libertaire et anti-guerre de 1881 jusqu’à 1914, avec Guillaume Davranche, auteur de Trop jeunes pour mourir. Ouvriers et révolutionnaire face à la guerre (1909-1914) aux éditions L’insomniaque/Libertalia (2014).
La première partie de l’émission (1h15) est consacrée, après une introduction de critique du rôle de l’État français dans l’engrenage vers l’affrontement de 1914-1918, au mouvement révolutionnaire (et surtout aux libertaires/anarchistes) de 1881 jusqu’en 1909 (phase insurrectionnaliste 1880-1889, phase grève-généraliste 1889-1901, phase « héroïque » du syndicalisme révolutionnaire 1901-1909).
La deuxième partie de l’émission (1h15) est consacrée à un résumé de certaines parties de Trop jeunes pour mourir, notamment celles consacrées aux mutations du courant anarchiste-communiste, au syndicalisme révolutionnaire, au mouvement de grève des cheminots de 1910, au mouvement anti-guerre, aux revirements de La Guerre Sociale, au Parti Socialiste et aux derniers jours d’avant-guerre.
Liens
Introduction (juillet 2016)
Un siècle après Verdun, les mensonges de l’histoire officielle demeurent : celui d’un État français pacifique et « agressé », n’ayant pas cherché une guerre généralisée, et celui d’une France unanimement belliciste (« la fleur au fusil »). L’Etat français était pourtant un des principaux responsables de l’engrenage qui allait conduire à une guerre meurtrière (plus de 10 millions de morts en Europe, principalement des jeunes prolétaires) : d’abord parce qu’il s’était, pour répondre impératifs de croissance d’un capitalisme national étouffant dans ses frontières, à ses demandes de débouchés, de matières premières et de main-d’œuvre quasi-gratuite, lancé dans une aventure coloniale qui avait attisé des tensions inter-impérialistes avec l’Allemagne au sujet du Maroc en 1906 et en 1911 ; ensuite parce qu’il souhaitait, au travers d’une guerre avec l’Allemagne, reprendre l’Alsace-Lorraine, pour des raisons idéologico-politiques (« la Revanche ») et économiques (mines, industries, réserves de charbon et de fer), et qu’il avait noué un système d’alliance en conséquent (avec l’Angleterre, qui voyait dans l’Allemagne son principal rival commercial, industriel et maritime, et avec la Russie tsariste, qui avait des ambitions territoriales sur les Balkans, d’où allait partir l’affrontement), lequel système d’alliance allait l’entraîner mécaniquement dans une guerre qu’il avait de toute façon voulue (et préparée) ; enfin parce qu’au cours des dernières années, des derniers mois comme des derniers jours précédant l’entrée en guerre, l’Etat français avait multiplié les signes belliqueux : loi des trois ans de service militaire, renforcement de l’alliance avec la Russie, matraquage belliciste, répression des mouvements anti-guerre, aucune tentative d’empêcher l’engrenage au cours des derniers jours, fausses rumeurs visant à une déstabilisation du mouvement anti-guerre… L’Etat français voulait cette guerre, même s’il l’aurait souhaitée rapide, complètement victorieuse (il avait formulé des buts de guerre délirants après coup, comme l’annexion d’une partie de l’Allemagne, cf. L’or et le sang. Les buts de guerre économiques de la Première Guerre mondiale de George-Henri Soutou), avec peu de pertes, et il l’a eu longue, destructrice, meurtrière de millions de prolétaires ; mais qu’on se rassure, en-dehors de pertes territoriales initiales, l’économie française s’est bien portée, surtout l’industrie de l’armement et ses profits considérables (cf. Les profiteurs de guerre 1914-1918 de François Bouloc), faisant trimer des millions de prolétaires dans des conditions difficiles et envoyant mourir des millions d’autres.
La République, l’État français, d’autre part, n’a pas eu, malgré un matraquage nationaliste-belliciste incessant, malgré une répression violente des oppositions à son bellicisme (déportation des déserteurs et des réfractaires, perquisitions-emprisonnement des opposants, répression des manifestations…), malgré l’intox’, une population unifiée derrière elle : jusqu’aux derniers jours, elle s’est heurtée à un important mouvement de contestation, composée de dizaines de milliers de prolétaires, de syndicalistes révolutionnaires et d’anarchistes-communistes, lequel seul peut-être loué pour ses tentatives d’empêcher une guerre meurtrière (contrairement au Parti socialiste et à certaines pontes du syndicalisme), et qui est pourtant complètement passé sous silence aujourd’hui.